TROP de SERMONS, pas ASSEZ d’AMBITIONS

 « L’initiative, la créativité et la passion sont des dons. Les salariés choisissent, jour après jour de les offrir à l’entreprise ou de les garder pour eux.

Ce n’est pas parce que vous aurez exhorté les gens à travailler davantage, ou parce que vous leur aurez ordonné d’aimer les clients et de combattre les concurrents que vous recevrez ces dons en cadeau.

Vous ne verrez s’épanouir ces talents que lorsque vous commencerez à vous demander à vous-même et à demander à vos salariés quelle sorte d’ambition mériterait tous ceux qui travaillent dans votre entreprise.

Quelle noble cause leur inspirerait l’envie d’offrir généreusement leurs talents. Pour obtenir cela, il faut plus que des exhortations, il faut un impératif moral.
Il peut s’agir de produire des produits d’une beauté inégalée (Apple). Il peut s’agir de guérir des maladies longtemps considérées comme incurables, (Genentech). Il peut s’agir de rassembler toute la connaissance du monde et de la mettre à la disposition de tous, gratuitement (Wikipédia).

Un impératif moral ne saurait être ni fabriqué de toutes pièces par les belles plumes. Non, cela doit naître tout naturellement du sentiment authentique qu’il y a une mission à accomplir, une possibilité à explorer, une injustice à combattre.

Un impératif moral n’est pas quelque chose que l’on invente pour en obtenir davantage de son personnel. Pour qu’il soit ressenti comme authentique, il faut que ce soit une fin, pas un moyen.

Pensez aux processus de management de votre entreprise. Combien de temps et d’importance ces rituels accordent-ils aux conversations portant sur la mission ultime et la destinée de l’entreprise ?

Quelle raison d’être et quelle ambition morale pour notre entreprise ? Pas beaucoup, j’en suis certain.

Assistez à une réunion lambda du comité de direction — où l’on discute stratégie, budgets, ressources humaines, ou tout autre sujet. Non seulement vous constaterez une absence notable de recours à l’hémi­sphère droit du cerveau, mais vous n’entendrez pratiquement rien qui permette de penser que les participants aient un cœur. La beauté. La vérité. Lamour. Le dévouement. La sagesse. La justice. La liberté. La compassion. Tels sont les impératifs moraux qui ont poussé les hommes à des réalisations extraordinaires au cours des siècles. Il est triste que le jargon du management laisse si peu de place à ces vertus.

Pour parler simplement, vous avez peu de chances d’obtenir que vos salariés mettent du cœur à l’ouvrage, s’ils n’ont pas le sentiment de travailler à un objectif inspiré par un idéal non seulement ambitieux, mais généreux.

Vous ne pourrez pas forcément insuffler à votre entreprise, à vous tout seul, le sentiment qu’elle a une mission à accomplir. En revanche, vous pouvez chercher des moyens d’intégrer des discussions sur la finalité et les grands principes qui inspirent l’action de votre entreprise au cœur même de ses discours officiels et de ses séminaires de réflexion.

Par exemple, la prochaine fois que vous assisterez à une réunion dont les participants seront en train de se demander comment tirer du personnel un nouveau surcroît de performance, vous pourriez poser les questions suivantes :
« À quelle fin, et au bénéfice de qui demandons-nous à nos salariés de donner le meilleur d’eux-mêmes ?
« Nous sommes-nous engagés à réaliser un objectif qui mérite authentiquement leur initiative, leur imagination, leur enthousiasme passionné ? »

Voici donc quelques nouveaux problèmes à résoudre dans le cadre de notre programme d’innovation managériale :

1.  Comment accroître la marge de liberté de vos collaborateurs en allé­geant le management sans sacrifier pour autant la cohérence, l’ordre et la discipline ?

2.  Comment créer une entreprise où l’esprit communautaire, et non la machinerie de la bureaucratie, rassemble les hommes ?

3.  Comment insuffler à votre entreprise le sentiment d’une mission assez enthousiasmante pour justifier des contributions extraordinaires ? »

Tiré du livre de Gary HAMEL – La fin du management-